Ces annonces unilatérales ne sont sans doute pas dépourvues de base juridique, même si la ministre de la Justice allemande Christine Lambrecht est montée au créneau en reprochant aux grandes entreprises de chercher à profiter de la situation : "Il est indécent et inacceptable que des entreprises financièrement solides cessent de payer leurs loyers", a-t-elle estimé. Ces grandes enseignes rassurent l’opinion publique en précisant qu’en fonction de la typologie des bailleurs, des discussions individuelles seront engagées au cas par cas. Le PDG d’Adidas Kasper Rorsted a ainsi déclaré au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung que l’essentiel des propriétaires des boutiques Adidas en Allemagne sont "d'importantes sociétés immobilières et des entreprises d'assurance", qui avaient "principalement fait preuve de compréhension" face au gel du paiement des loyers. Adidas ne lèsera pas les petits propriétaires privés, a-t-il garanti. "Ils recevront leur loyer d'avril comme à l'ordinaire". H&M a pour sa part informé les propriétaires concernés et espère trouver "une solution mutuellement acceptable" dans les meilleurs délais.
Plus généralement, on comprend bien que les entreprises exercent ainsi une forme de pression sur les pouvoirs publics pour limiter dans le temps les mesures de fermeture administrative qui finissent par leur coûter très cher en termes de chiffres d’affaires. L’Allemagne est pour le moment un cas particulier en Europe puisque le confinement n’y est pas aussi strict qu’ailleurs et qu’une grande partie de l’économie continue de fonctionner. Mais la question des loyers payés par les entreprises sur l’immobilier tertiaire va nécessairement être un sujet de discussions dans les mois à venir, y compris dans d’autres pays européens. Chaque acteur prendra inévitablement sa part du fardeau de la récession économique consécutive à cette crise sanitaire sans précédent depuis plus d’un siècle.